beatitudes« Que du bonheur ! » Formule à la mode, qu’on répète machinalement, incantation plutôt que constatation, et double mensonge. Car le malheur existe. Et le bonheur n’est jamais exhaustif. Heureusement ! Sinon notre cœur serait sans désir et notre âme sans avenir.

Le bonheur ? Le mot n’est pas dans l’évangile. Sans doute est-il trop lourd de malentendus. En tout cas Jésus n’emploie pas le substantif : le bonheur n’est pas une chose. À la limite le bonheur n’existe pas ! Vous repasserez, marchands de bonheur, pères Noël à la manque, voleurs d’âme, faiseurs de promesses en tout genre, fieffés menteurs ! Je n’y crois plus : aucune chose ne porte bonheur. Et de toi surtout je me méfie : vieil idolâtre que je suis, qui rêve encore de paradis illusoires et de piètres satisfactions.

Jésus dit: Bienheureux ! C’est un adjectif. Des yeux qui brillent. Un battement de cœur. Un ange qui passe. Jésus le dit huit fois de suite, là-haut sur la montagne. Il suffit d’aimer, d’aimer comme un fou – comme lui. Aimer sous le signe du don, le cœur pauvre et désarmé. Aimer avec compassion, le cœur inconsolable et insatiable. Aimer purement et simplement, avec un cœur d’enfant, pacifié et pacifiant. Aimer à en mourir, peut-être, à en souffrir, sans doute – agneau au milieu des loups.

Attention ! La béatitude n’est pas dans ces belles choses, ces beaux élans. S’y mêleraient bientôt un secret orgueil, un petit sourire de satisfaction. La pure joie n’est pas d’aimer mais d’être aimé. Parce que vos noms sont écrits dans le Ciel.

Pas d’autre béatitude (à vrai dire) que l’extase éternelle des Trois Personnes divines. Tendresse infinie, brûlante comme un  feu, rafraîchissante comme une source, dont Jésus Christ fait l’annonce et l’offrande. Le Royaume est là. Vous serez consolés, comblés, pardonnés, illuminés, recréés. Il suffit de consentir. Heureuse l’âme pauvre, qui permet à l’Amour de faire des miracles.